Outre les interviews et papiers plus longs déjà publiées sur ce blog, la presse a aussi largement reviewé « IRM », pour preuve :
- Les Inrockuptibles, Christophe Conte, 11 décembre
Charlotte Gainsbourg : IRM en chronique et écoute intégrale,
Splendide second album pour la chanteuse, prise sous l’aile de Beck. Un fan américain de son père qui réunit ainsi deux générations de Gainsbourg. Avant l’entretien dans quelques jours, auscultation et écoute intégrale de son IRM.
Trois ans (seulement) après Air, c’est donc Beck qui se colle à la délicate mission de réanimer définitivement Charlotte Gainsbourg en chanteuse. Car si 5:55 reprenait tout en beautés vaporeuses le cours des choses laissées en suspens depuis 1986 (Charlotte for Ever, encore sous tutelle paternelle), il n’était pas gagné que Miss Charlotte reprenne si tôt goût à poser sa voix sur des musiques qui, quoi qu’on fasse, rappellent toujours au souvenir de l’hôte de la rue de Verneuil. Si Dunckel et Godin avaient habilement contourné le piège en façonnant avec style et détachement un album de Air featuring Charlotte G., Beck ne résiste pas très longtemps ici à l’envie de se frotter aux bijoux de famille. Ses plagiats éhontés de Serge Gainsbourg à l’époque de Sea Change (Paper Tiger) ont démontré qu’il en avait,sinon le génie, au moins le savoir-faire. Il y a certes beaucoup de pistes sur cet album, plus varié et joueur que le précédent, mais ce sont d’abord celles qui mènent à Dieu le père et au Saint-Esprit de ses arrangeurs,notamment à Jean-Claude Vannier, qui éblouissent en premier lieu. La montée orageuse des cordes façon Manon sur Vanities, les volutes de choeurs venant troubler les arpèges de guitare sur l’extraordinaire Time of the Assassins, les plus lointaines réminiscences de New York USA sur Voyage, la mélancolie toute birkinienne de In the End (deux minutes à faire fondre l’Himalaya) : autant de pièces à conviction qui convainquent que Beck était bien l’homme à relever un tel défi.
En plus, l’Américain est fourbe, car au lieu de tomber dans le piège de la reprise de Gainsbourg, il envoie Charlotte dans la gueule du Chat du café des Artistes, chef d’oeuvre signé Jean-Pierre Ferland. Sorti en 1970, l’album Jaune dont cette merveille astrale est le point d’orgue est considéré comme le Melody Nelson québécois (ça fait sourire comme ça, mais c’est pourtant troublant de vérité), et telle mise en abyme est une preuve supplémentaire de l’art félin dont Beck fait preuve sur ce disque. Exquise esquive aurait dit qui vous savez. Mais n’oublions pas Charlotte, car c’est elle qui donne chair à des morceaux plus surprenants comme IRM, Trick Pony ou Greenwich Mean Time en sortant de sa traditionnelle carapace de velours pour elle aussi jouer les félines, pedigree tigresse. Ou sur Heaven Can Wait pour se fondre carrément dans la majesté diamantaire des Beatles. Lennon incest ?
Album : IRM (Because/Warner)